Seversky puis Republic P-35 de William Bros Inc au 1/32

Ce post est l'un des plus intéressants que j'ai pu lire. Bravo !

Merci les copains.

Sur le J9, deux "pods" volumineux permettaient la récupération des étuis de cartouche.
Ces modifications sont réalisées en Suède.






Ici sur le P-35 conservé






Je les ai fabriqué avec de la carte plastique





Les 60 EP-106 d'exportation livrés en étaient dépourvus.





Autre modification mineure, qui évoluera au fur et à mesure des années, le remplacement des tubulures d'échappement d'origine par des plus longues.





à suivre avec la peinture et la réplique achevée.

Des petits détails qui font la différence

La position suédoise inconfortable ou le cul entre deux chaises !

L’Allemagne s’apprête à attaquer la Norvège.
La Suède, pays neutre depuis plus de 165 ans, est sommée par Hitler de laisser passer ses troupes. Elle n’a pas beaucoup de choix face la puissance militaire du 3ème Reich et cherche à éviter le pire…on comprend !
Avec 6.3 millions d’habitants et peu de ressources en matière de défense elle ne ferait pas le poids face l’Allemagne nationale-socialiste (environ 80 millions d’habitants, territoires annexés inclus). Elle tergiverse et accepte à la condition que les soldats ne transportent pas d’armes, ce qui provoque l’hilarité des allemands!  
Elle est aussi, plus ou moins, contrainte de vendre du minerai de fer à l’Allemagne nazie (ce qui fait quand même bien son affaire!). Jusqu’en 1944, elle lui en procure 11 millions de tonnes (pour une consommation allemande totale de 15 millions de tonnes).

La Flygvapnet (Armée de l’Air Suédoise) ne possède que des Gloster Gladiator et des Fiat CR-42 pour s’opposer à la Luftwaffe !

Le biplan britannique obsolète







Et le sesquiplan italien qui ne l’est pas moins







Elle attend avec fébrilité la livraison des différents types d’avions commandés aux USA en 1937, notamment les 145 avions de chasse Vultee V-48 Vanguard  renommés J20 et qui tardent à arriver.

Le Vanguard aux couleurs de l'Air Corps





EMBARGO !

Les USA craignent qu’Hitler n’envahisse aussi la Suède et c’est la saisie par le gouvernement américain de 205 avions de chasse qui va faire défaut à la Suède.
C’est le résultat du « fameux embargo » sur les armes que ce dernier décrète début juillet, ainsi qu’une loi votée en octobre qui permet la confiscation des fournitures de guerre non encore livrées.

Seuls 60 des 120 EP-106 commandés à Seversky parviennent à destination.
45 avions arrivent en caisse en Norvège et sont acheminés « in extrémis » en Suède, juste avant que les nazis n’envahissent le pays.
Les 15 autres vont transiter par la Finlande, pays ami qui n’oublie pas l’aide que la Suède lui a prodiguée pendant la « Guerre d’Hiver » où elle a subi la fourbe attaque d’un autre dictateur maître de l’URSS, un certain Joseph Staline.
Entre autre aide et sous le couvert de la confidentialité, la Suède a envoyé en Finlande un détachement de Gloster Gladiator avec « pilotes et mécaniciens volontaires ».

Un Gladiator suédois intégré à la 278 Flygflottilj F-19 finlandaise à Kemi en mars 1940. Il arbore sur le fuselage une peinture personnalisée en place des cocardes aux 3 couronnes suédoises. Les swastikas finlandaises viennent se superposer à celles suédoises en intrados et extrados des ailes.






Les Gladiator prêtés par la Suède, alignés pour leur retour au pays à la fin de la "Guerre d'Hiver" en Finlande.






Combats aériens

Les J9 sont destinés prioritairement à la défense de Stockholm. Ils patrouillent aussi le long de la frontière avec la Norvège où les incursions de la Luftwaffe sont régulières.









L’intercepteur de Seversky est déjà obsolète en 1938 et la formation des pilotes suédois n’est pas du niveau de celle de la Luftwaffe. A chaque rencontre les J9 sont en infériorité technique et souvent numérique.
Tout comme elle le fait avec l’Armée de l’Air Suisse et malgré la neutralité du pays, la Luftwaffe engage régulièrement les Suédois dans leur espace aérien.
Les combats sporadiques sont toujours à l’avantage des Allemands qui abattent au moins six J9 (certaines sources en évoquent huit) et tuent plusieurs pilotes.
Dans la nuit du 29 au 30 septembre 1943 deux J-9 décollent sur alerte pour intercepter des hostiles qui ont pénétré l’espace aérien. Ils sont abattus par des chasseurs de nuit  Messerschmitt Bf-110






Dans la durée…

Malgré le fort taux d’attrition des chasseurs Seversky et les difficultés à se procurer des pièces de rechange, les Suédois utilisent leurs J9 jusqu’en 1952.


à suivre

Oh que c'est top...

On suit toujours avec attention

turtlesix a écrit:

On suit toujours avec attention

C'est bien  



Lorsque les avions parviennent en Suède, ils sont en aluminium brut et arborent les cocardes suédoises aux 6 emplacements habituels (sans liserés jaunes).








Ils sont immédiatement pris en charge et la formation des pilotes et de mécaniciens commence aussitôt.
Dans un premier temps, les parties supérieures sont peintes en vert olive foncé. Les inférieures sont bleues avec un débordement sur l'avant des côtés du capot moteur












parfois remontant sur le bas du fuselage






Puis le type de camouflage italien est adopté en excluant les taches brunes foncées.

D’un avion à l’autre les taches ocre jaune sont plus ou moins étendues, mais toujours d’aspect flou.
Les cocardes sont portées aux 6 endroits habituels mais elles reçoivent un cerclage jaune haute visibilité.

2 rares photos d'époque en couleurs











L’intrados est traité en bleu clair avec une particularité: la reprise de la peinture RAF « haute visibilité » du début de guerre, soit plus de la moitié de l’aile gauche en noir et l’autre aile en blanc et les cocardes nationales sont de très grande taille






Ce type de camouflage sera porté jusqu’à la fin du conflit.
A l’issue, il laissera peu à peu place au retour de la robe aluminium.






Les avions reçoivent un chiffre individualisé blanc de grande taille sur les côtés à l’avant du fuselage. Ils occupent aussi la totalité du plan fixe vertical et du gouvernail. Ce sera la règle (avec parfois des digressions !) pendant toute la durée du conflit.
On note aussi le chiffre 8 près des cocardes de fuselage






Dans la période 1942/1943 on observe l’apparition d’une certaine disparité dans des « nose art » animaliers personnalisés.

Guêpe, tigre et bouc bondissant, colombe, aigle… un vrai bestiaire !






















Outre ces « isolés » 45 avions sont répartis en 3 escadrilles F8. D’autres J9 se retrouvent au sein du « Staffgruppen ».
Ils sont tous basées à Barbaki.

L’insigne choisi représente un grand corbeau noir inscrit dans un cercle de couleur.

La première escadrille 1 choisit le jaune (pas trouvé d'épreuve en couleurs, mais la teinte claire et les légendes donnent la 1ère escadrille)










la 2ème opte pour le bleu,








quant à la 3ème, elle adopte le rouge.





Les autres corbeaux du « Staffgruppen » - lorsqu’ils sont peints -  s’inscrivent dans un cercle blanc.
Ces emblèmes et autres marquages évolueront à l’issue du conflit, jusqu’au retrait des J9 en 1952.

Lors des périodes hivernales, certains avions reçoivent un camouflage adapté. On recouvre le vert par du blanc lavable. Plusieurs essais se succèdent au fil des années….





Mise en peinture de la réplique

J’ai choisi de représenter un J9 de la troisième escadrille F8.

Je peins aux enamel et comme d’habitude, je commence par un dégraissage général à l’aide d’un peu d’essence F.
Les surfaces inférieures ont d’abord reçu un voile blanc satiné, puis le bleu clair. Les ailes sont en partie en noir et blanc.  















En extrados et sur les flancs du fuselage, l'ocre jaune succède au vert olive foncé.










Les cocardes sont faites au pochoir.  

























Les grands chiffres aussi






Les corbeaux de part et d’autre du fuselage et les chiffres 8 sont dessinés puis imprimés en noir sur décalque vierge.
Ils sont détourés au plus près afin d’éviter de voir apparaître le film du calque.
























Voilà pour le traitement du J9 qui clôt l'étude sur les trois maquettes du P-35.


La suite sera aussi la fin de la saga Seversky!


Serge

Waouh  elle en jette ta maquette, à la peinture et la décoration chiadé, bravo pour ce

Il est vraiment superbe!!! Et que dire de l'étude, elle est tip top..

JP a écrit:

Il est vraiment superbe!!! Et que dire de l'étude, elle est tip top..

C'est difficile de faire une synthèse sur une étude historique de ce type sans faire l'impasse sur de nombreuses anecdotes et détails techniques concernant les avions et les maquettes associées.


En ce qui concerne les montages et les modifications de ces 3 maquettes - du seul P-35 existant au 1/32 -  il faut se rappeler qu'elles ont vu le jour au début des années 2000. A l'époque elles n'étaient pas destinées à parution, il n'y a pas beaucoup de photos exploitables (quand il y en a....) et les pas à pas s'en trouvent réduits mais les informations d’amélioration, dont les plans 5 vues parfaitement détaillés, devraient venir en aide aux maquettistes désireux d’élever un peu le niveau de ce « vintage minimaliste » !



Les caractéristiques techniques du P-35 A :

Chasseur monoplace, monoplan monomoteur tout aluminium avec hélice tripale à pas variable en vol, train semi rentrant et volets.

Premier vol : 1937
Longueur : 8.17 m
Envergure : 10.97 m
Hauteur au sol : 2.97 m
Masse à vide : 2075 kg
Poids total à charge : 2775 kg
P.T.C. maxi au décollage : 3050 kg
Motorisation : Radial Pratt & Withney Twin Wasp R-1830 de 1050 cv
Vitesse de croisière 3000 m 418 km/h
Vitesse max : 465 km/h
Autonomie : 1500 km
Plafond pratique : 9500 m
Nombre d’avions construits : 177
Armement : deux mitrailleuses cal 50 et deux autres cal 30.
Charge offensive maxi possible sous les ailes : 160 kg



Outre mes recherches sur le net, les principaux ouvrages consultés pour mon étude sont:

Dans l'Album du Fanatique de l'Aviation de 1973, du n° 44 au n° 49, La saga Seversky et P-35 dans le détail par Pierre Gaillard et Howard Levy.




Le classique Squadron Signal Publication qui innove avec son n°1 de sa série "mini" dédié au P-35







Un excellent livre sur les P-35 d'exportation en Suède avec une aparté sur les AT-12 Guardsman et les P-66 Vanguard, avec de nombreuses photos de détail (beaucoup inédites) et d'explications techniques. Excellent ouvrage pour découvrir l'avion et ses péripéties (en anglais).




Les Survivants :

Un P-35 A est conservé à l’Air Force Museum de Dayton en Ohio







Un EP1-106 victime de l’embargo a été rétrocédé à la Suède par les USA, à sa demande.








Un autre est conservé au musée de l’aviation de Linköping en Suède.






Enfin, un AT12 Guardsman (version biplace en tandem) est conservé en état de vol au « Planes of Fame Air Museum » de Chino en Californie où j’ai pu le photographier jadis.
Il fait partie des avions frappés d’embargo jamais livrés à la Suède.






Alexander de Seversky  - Epilogue :

Alexander Prokofiev « Sasha » de Seversky, né Alexander Nikolaieïvitch Prokofiev-Severskii, inventeur prolifique, insatiable chercheur en innovations techniques, en collaboration avec le génial Alexander Kartveli, a incontestablement participé au développement des aéronefs d’entre deux guerre.

Le P-35 est lauréat de nombreux prix dans les courses de vitesse. Il est en avance sur son temps, mais en qualité d’avion « bon de guerre », c’est un échec.

Son histoire, tout comme celle du racers français de Marcel Riffard






et de l’allemand de Ernst Heinrich Heinkel






... semble démontrer qu’il est bien difficile de réussir à transformer un avion, initialement prévu pour les courses, en avion de combat !


Le Caudron Renault C 450 vainqueur de la Coupe Deutsch de la Meurthe avec Maurice Arnoux et du record de vitesse d'Hélène Boucher tous deux en 1934






Maurice Arnoux





Hélène Boucher






le suivant, C 460 (réplique en état de vol)







le He 100






En 1938, aux commandes du He 100 V2 Ernst Udet établit un record de vitesse en circuit fermé sur 100 km avec 634 km/h .





et le He 100 V3, prototype amélioré, établi en 1939, avec Hans Dieterle comme pilote d'essai, un nouveau record du monde de vitesse absolue avec 746,6 km/h.







Les tentatives pour faire de ces chevaux de courses de fiers guerriers sont vouées à l'échec:

Le Caudron Renault CR 714 en opération sera un lamentable fiasco!





Etude de la maquette Azur au 1/32 pour le magazine Réplic







Quant au He 100 il n'entrera jamais en service actif et ne servira qu'à la propagande nazie (fort réussie par ailleurs!).




Etude de la maquette Special Hobby au 1/32 pour le  magazine Réplic





L’obsolescence du P-35 est très rapide. En outre, l’état catastrophique des finances de la Société Severski et les manigances de la concurrence ne lui laisseront pas le temps de concrétiser les développements indispensables à l’intercepteur prévu, tels que le blindage de l’habitacle ou les réservoirs auto obturant….

Enfin, les décisions commerciales de vente à l’URSS et surtout au Japon lui coûtent son entreprise.


L’illustre descendant du P-35

Le projet qui aboutit au P-35 est celui mené à bien par Alexander Kartveli dont j'ai brossé le portrait plus haut. Après la dissolution de Seversky Inc, sous le label Republic, il continue inlassablement à le développer jusqu’à la naissance du P-43 Lancer qui va à son tour, servir de base à l’avènement d’un avion mythique, le P-47 Thunderbolt !


Plagiat italien

Le P-35 est plagié par le constructeur Italien Roberto Longhi qui s’en inspire abondamment  pour produire le Reggiane Re 2000










...suivi du Re 2001 à moteur en ligne. Ils ne feront pas une carrière illustre au sein de la Regia Aéronautica.



Alexander de Seversky s’est marié avec Evelyn Olliphant , très connue à New York en tant que pilote en 1923.





Lors des "belles années"....





Née en 1907, elle décède à l’âge de 60 ans.


Les années d’après guerre

Malgré ses déboires de Seversky n’est pas le type d'homme qui "baisse les bras".







Il continue sur sa lancée d’innovations tout azimut et développe une propension exceptionnelle pour capter l'attention du public.

Une BD a été réalisée en son honneur et elle a connu un franc succès.






Lors de la création du Strategic Air Command en 1946, il participe activement (entre-autres) au développement du Convair B-36







et du Boeing B-47 Stratojet.





Congratulé pour la qualité de ses réussites





Toujours bouillonnant d’idées, en 1964 il travaille sur projet « un peu dingue », le Ionocraft.
Il s’agit d’un engin destiné à transporter un homme propulsé par le vent ionique issu d'une décharge à haute tension!





film:

https://www.youtube.com/watch?v=GijJmIz1G7U



En 1972, Seversky fonde et administre le célèbre  New York Institute of Technology.
Il donne des conférences sur l’utilisation stratégique de la puissance aérienne et écrit plusieurs ouvrages sur le sujet, notamment :

en 1950 parait  Air Power - Key to Survival  (La puissance aérienne, la clé de la survie)






Victory Through Air Power (La victoire de la puissance aérienne)







Soviet Air Force (La force aérienne soviétique)






Et Too Young to Die! (Trop jeune pour mourir!) paru en 1961 et récemment réédité







A ma connaissance, ces ouvrages n’ont pas été traduits en français.


Seversky décède en 1974 au Memorial Hospital de New York. Sa dépouille repose au cimetière Woodlawn dans le Bronx .


Ainsi s'achève l'histoire de Seversky, du P-35 et de ses contemporains ainsi que le montage de 3 maquettes. Malgré l'importance de la documentation et du texte j'espère que vous avez eu plaisir à en prendre connaissance.

En 1972...






Serge

Vraiment des plus intéressant et j'ai appris pas mal de chose merci Serge

Merci beaucoup Serge..

Hello Serge,
Une superbe étude, avec de bien belles maquettes à la clé!
J'ai pris beaucoup de plaisir à la lire, un grand merci pour ton travail

C'est moi qui vous remercie pour votre intérêt sur cette saga et vos commentaires.
@+ Serge