Le crash de Murphy.
Sur un socle de 35 x 55 cm, gît l’épave du MR-V avec Murphy emprisonné dans son cockpit, essayant en vain de dégager la verrière bloquée.
La Jeep de la RAF depuis laquelle le chef mécanicien Mike Parkes se précipite au secours du pilote avec en main le fameux démonte pneu salvateur est stoppée à proximité de l'avion.
Bonne lecture!
L’histoire :
Le 10 août 1944, le Flying Officer Geoffrey Murphy du 245 Squadron (121 Wing) est aux commandes du Hawker Typhoon MR-V, serial JR499, et participe à une attaque ciblée sur le château de Saint Germain-Langot, résidence de l’état-major de la 21ème panzer division.
Avant de pouvoir s’aligner pour tirer ses roquettes il reçoit « un cadeau de la DCA » très active sur site. Il prend un coup direct en extrados qui a pour effet de sectionner l’hydraulique du train d’atterrissage.
Après s’être délesté de ses roquettes, il rentre avec son escadrille sur l’ALG (advanced landing ground) B5 à le Fresne-Camilly où est basé son Squadron.
Cette photo de la zone technique de B5 à le Fresne-Camilly nous permet d’observer que les avions de la RAF n’étaient pas toujours les seuls sur base. Outre les Spitfire, les Typhoons et les P51 Mustang « bird cage » on distingue trois P47 Thunderbolt en version « razorback » aux couleurs US. (Imperial War Museum.)
Autre vue bucolique de B5 Le Fresne-Camilly qui pourrait susciter des idées de diorama. (Imperial War Museum).
Après quelques instants particulièrement éprouvant où Murphy se retrouve dans une situation critique, il parvient à reprendre le contrôle de son "Typhie" qui ne vole plus comme d'habitude!
Sur le chemin du retour, son chef d’escadrille, le commandant Jack Collins* vient se porter à son niveau pour évaluer les dégâts et l’informe que la jambe gauche du train d’atterrissage pend sous l’avion.
Murphy tente alors plusieurs manœuvres consécutives de sortie et rentrée du train, mais rien n’y fait.
* Le squadron leader Jack Collins perdra la vie le lendemain 11 Août, abattu par la "flak", hantise des pilotes d'assaut.
Il avait 31 ans. Il repose dans le cimetière de Ranville, Calvados, village célèbre pour les combats de la libération autour du pont "Horsa Bridge".
Parvenu à la verticale de la base, on propose à Geoffrey d’évacuer son avion en parachute mais il préfère tenter un atterrissage.
Dessin des installations de B5 (50 aérodromes pour une victoire éditions Heimdal).
Le Napier Sabre tourne comme une horloge et il est donc décidé de laisser poser tous les avions de l’escadrille avant de tenter la chose. Lorsque tout le monde a regagné le plancher des vaches, Murphy passe en revue la « chek list » d’urgence et délaissant la piste en treillis, il s’aligne sur la bande herbeuse à proximité. Il est alors interrompu par son chef d’escadrille qui le contacte depuis le sol, ce qui a pour effet de lui faire oublier un détail d’importance : larguer la verrière !
Quand il s’en aperçoit c’est trop tard, il est en très courte finale et n’a pas d’autre alternative que de se concentrer sur l’atterrissage qui va être rude.
Six tonnes lancées à 250 km/h avec une jambe de train qui pend sous l’avion et ce volumineux radiateur - pas idéalement placé pour l’exercice - ne vont pas être une « piece of cake » !
Quelques photos tirées d'un film des archives de l'IWM.
Heureusement, l’hydraulique des volets n’a pas été touchée et Murphy réussit sa prise de terrain et glisse sur le ventre dans le fracas et la poussière de l’été normand. La décélération est brutale et les sangles du harnais bien serrées lui rentrent dans les épaules.
La fumée envahit l’avion, il se détache rapidement et essai désespérément de faire glisser la verrière mais en vain. La cellule s’est déformée sous l’impact de l’atterrissage et il n’y parvient pas.
Il cède presque à la panique en se remémorant la fin atroce d’un autre pilote de Typhoon brûlé vif dans son cercueil de métal qu’il n’a pu évacuer. Mais la chance est là et le Typhoon ne brûle pas.
Geoff Murphy est tiré d’affaire grâce à l’initiative de l’officier mécanicien Mike Parkes qui saute d’une jeep et muni d’un démonte pneus, débloque la verrière récalcitrante.
Dans ses mémoires, Geoffrey déclarera : «… with the best-looking crowbar i’ve ever seen and managed to lever it off » ce qui peut se traduire par « … avec le meilleur pied de biche que je n’ai jamais vu et aussi bien utilisé » ! (I.5, IWM 6- Geoff Murphy)
Geoffrey Murphy:
En octobre 1941, il a 18 ans et il s'engage dans la RAF. Sa formation s'effectue aux USA et elle s'achève en Angleterre en 1942. Il vole principalement sur Hurricane et en avril 1944, il est qualifié sur Typhoon et rejoint le Squadron 245 qu'il ne quittera plus.
Il prend le commandement de la deuxième escadrille et participe à toutes les opérations avant, pendant et après le débarquement de Normandie.
Ici, aux commandes du MR-Z
A Hendon en 1971, Geoffrey Murphy à bord de l'unique Typhoon conservé "dans son jus"* sur les 3370 construits.
* le Typhoon MN235 a effectué son premier vol le 8 Février 1944 à Hucclecote et il est déclaré opérationnel aussitôt.
C'est l'unique modèle d'époque rescapé des ferraillages qui ont eu lieu dès l'issue du second conflit mondial.
Il a survécu grâce à l'effet de la loi Lend Lease (échange pour évaluation de matériel avec les USA) et d'un bon facteur chance.
Les "Etasuniens" ont testé l'avion qui ne leur a pas plu, puis l'ont remisé dans un hangar où il a été oublié.
En 1967, les britanniques le récupèrent à l'occasion du 50ème anniversaire de la RAF contre un Hurricane en état de vol.
En 1972 il rejoint la collection des "warbirds" au Camm Hall de Hendon.
La casserole d'hélice est la seule pièce rapportée, l'originale ayant été perdue aux USA.
Le 8 mai 2014, il quitte temporairement l'Angleterre pour le Canada et rejoint le Musée de l'Aviation de Rockcliffe à Ottawa pour les festivités du 70 ème anniversaire du D- Day.
Le 12 avril 2018, il rentre au Royaume Uni et depuis fin Novembre 2018, il est à nouveau visible au musée de la RAF à Hendon, exposé dans le Hangar 3.
Ici, en cours de remontage avant exposition.
La casserole d'hélice a été repeinte en noir et l'avion a reçu l'immatriculation I8 - T du 440 RCAF Squadron "City of Ottawa"
Ce type de code avec lettre/chiffre/lettre est attribué aux Squadrons canadiens.
Toutefois, en comparant l'épaisseur des marquages avec ceux des avions d'époque, on remarque immédiatement leur minimalisme: ils sont deux fois moins épais.
Photo d'époque du vrai I8 - T avec les marquages de taille correcte et certainement un problème de train d'atterrissage.
Les palmiers en fond laissent à penser que la photo a été prise lorsque l'avion était en essais aux Etats Unis.
On remarque que les avions du 440 RCAF squadron sont équipés de racks pour bombes et pas des rails à roquettes qui rendront l'avion célèbre en Normandie.
LE I8 - P au point fixe près des jerricans de carburant, en été à le Fresne Camilly
Le I8 - R toujours en Normandie, mais dans la boue dans cette fois. On remarque les deux types d'hélices qui équipaient les
Mk IB (l'avion au fond est un tripale).
Le I8-E en mauvaise posture. La disparition des bandes dites d'invasion et les nouvelles cocardes d'ailes quadricolore ramènent le cliché à l'hiver 1944, vraisemblablement aux Pays bas.
D'autres Typhoon à venir?:
Quatre autres Typhoon ("car door et bubble") font l'objet de tentatives de construction au sein de collections privées:
JR505 - JP843 - RB396 et EJ922.
D'après d'autres sources plusieurs autres travaux sont en cours (au moins 2 cellules répertoriées).
Maquettes existantes au 1/32 :Au 1/32, seules deux maquettes du Typhie ont été produites. L’une en styrène, l’autre en résine.
- La première est le « vintage Car Door de Revell » parue initialement fin des années 60 et rééditée au cours du temps avec un boitage et des décalques différents, mais sans aucune modification de moulage.
L'une des premières boites de la maquette:
La deuxième, quasiment introuvable à présent, est une belle production en résine et en quantité limitée de chez Model Design Construction (MDC) de la version « bubble ».
Les formes générales sont excellentes, la gravure des panneaux et les lignes de rivets sont peu visibles ce qui est dommage.
Le concept de fabrication est bien pensé et la notice, bien "ficelée" aussi, permet une bonne compréhension des étapes de montage.
Les décalques sont d'excellente facture et concernent 5 avions; il y a aussi de la photodécoupe.
J'ai pris plaisir à le monter au profit du feu magazine Replic en 2007.
Voilà pour l'aparté du Typhie de MDC.
C’est donc le vieux "car door" de Revell - que l'on trouve encore aisément sur le marché de l'occasion - qui va me servir de base pour réaliser l’avion de Murphy.
Ceux qui connaissent la maquette comprendront le travail nécessaire aux modifications à prévoir pour obtenir une « réplique mise à niveau ».
Première étape, ponçage de la totalité des surfaces en relief qui couvrent la maquette.
Disparition des rivets de type locomotive qui constellent l’avion et des lignes en relief.
Reprise des dites lignes en creux et aux bons endroits de préférence et traçage des lignes de rivets à la roulette et à la pointe sèche.
Pour les grandes lignes, j'ai utilisé la technique par transfert sur calque. A l'aide des "plans rivetés" ramenés au 1/32, j'ai reporté les lignes de structure et les rivets. En retournant le calque, j'ai repassé les tracés au crayon gras sur et sous les ailes et j'ai repris les manques directement à main levée après avoir pris les mesures et placé les repères.
Essai sur l'exrados de l'aile droite
Déplacement des orifices d’évacuation des douilles des canons, placés trop bas en intrados des ailes.
L’assemblage nécessite du mastic et des séances de ponçage
Les trappes de visite et autres panneaux techniques sont repris en relief à l’aide de carte plastique fine.
Tout est figé dans cette maquette et afin de tenter de lui apporter un peu de dynamisme, j’ai dû intervenir sur les volets, les ailerons et gouvernes de queue.
Les gouvernes de profondeur retravaillées après leur désolidarisation des plans fixes.
Une fois les volets de courbure dissociés des ailes, je découpe les caches dans de la carte plastique et je pratique les orifices au punch & die. L’écartement entre intrados et extrados doit être conservé.
Les baies de train étaient totalement vide et à l’aide de photos prises à Hendon ...
et des schémas des notices techniques d’époque ...
... j’ai confectionné les pièces absentes : bonbonnes d’air comprimé, câbles et durites, ainsi que tout le treillis en relief et amélioré les jambes et les pantalons de train.
Un gros travail inutile me direz-vous puisqu'au final, l’avion reposera sur le ventre et que l’on y verra plus rien.
Certes, mais le souci du détail a peut-être primé sur les impasses que j'aurai pu m'accorder?
Le bord de fuite du gouvernail est affiné et muni d'un nouveau trim.
Suite à une faiblesse de structure du fuselage (la queue se détachait après de fortes vibrations), plusieurs accidents mortels ont été déplorés dès la mise en service de l’avion. Ne parvenant pas à détecter le défaut, il a été interdit de vol et sa carrière a bien failli s’arrêter avant d’avoir vraiment commencé. Mais le pilote d'essai Philip Lucas tente de trouver le problème et il a la chance d'échapper à l'accident. De retour au sol, il est en mesure d'en expliquer les causes.
Ainsi, le défaut structurel sur la dernière section du fuselage est réparé par la pose de pièces périphériques de renfort, ce qui met fin aux accidents.
Je les ai figurées en carte plastique.
Fabrication des imposants volets de courbures en carte plastique et application d'une peinture « primer » .
Désolidarisation et reprise des bords d’attaque des ailerons
Le volet de refroidissement est désolidarisé de son volumineux radiateur et refait en carte plastique avec sa charnière et son guide
Quelques pièces assez grossières de l’habitacle issues de deux boites aux moulages de couleurs différentes.
Elles seront écartées au profit d’autres créées en scratch.
Une partie de l’habitacle
Amélioration de la prise d’air du radiateur
L’avion reçoit un voile de teinte alu. Ici, en intrados
La modification de la version « car door » en version « bubble », n’est pas compliquée. Les portes sont collés au fuselage et l’alignement se fait au mastic qui, une fois poncé, fera disparaître les joints.
Le schéma de camouflage sur les Typhoon donne des lignes de séparation assez nettes et après avoir passé la couleur verte, j’ai découpé au pochoir le modèle de celui de l’avion
La teinte grise est ensuite appliquée, puis après séchage, les caches sont enlevés.
Comme j’utilise toujours les enamels (Humbrol, Testor, Revell, ...), un délicat ponçage est réalisé à la paille de fer d’ébéniste 00, (pour un résultat équivalent, j'ignore si la technique est adaptable en présence de peintures acryliques ?).
Voilà pour le premier volet de ce projet.
Serge